Rixes entre groupes de cités différentes entrainant le décès de jeunes adolescents, incendies de véhicules, guets-apens contre pompiers et forces de l’ordre ; ces événements se multiplient.
Afin de trouver des solutions pour lutter contre les violences de bandes, une réunion interministérielle Intérieur/Justice/Éducation a été organisée le premier mars. Ắ l’issue de laquelle ont été annoncées :
– des mesures, censées être déjà mises en œuvre (réactivation d’un plan de lutte contre les bandes datant de 2010) ;
– des déclarations d’intention (renforcer la collaboration avec l’Éducation nationale, réduire des délais de jugement des affaires mettant en cause des mineurs) ;
– des dispositifs déjà existants (création de groupes locaux de traitement de la délinquance).
En dehors du recours à l’interdiction de paraitre comme mesure alternative aux poursuites (dont l’application est difficilement contrôlable), aucune annonce ne porte sur de nouveaux moyens d’action.
Le 7 mars, évoquant les violences auxquelles la banlieue lyonnaise est confrontée depuis le début du mois, le ministre de l’intérieur déclarait :
« S’il y a des violences urbaines, des voitures brûlées, des policiers qui sont pris à partie et des élus qui sont menacés, c’est parce qu’avec les polices municipales, la police nationale intervient et démantèle chaque jour des points de deal (…). Plus il y aura harcèlement de ces points de deal, plus il y aura manifestement réaction des dealers mais à la fin ce sera toujours la police qui va gagner«
La situation actuelle serait donc liée à l’existence de trafics. L’action volontariste contre ceux-ci et le déploiement en nombre de policiers ou de gendarmes serait la solution.
Bien que cette explication ait déjà été maintes fois donnée par le passé, les violences urbaines perdurent en France depuis plus de 40 ans.
La première ‘’ émeute urbaine’’ officiellement recensée s’est déroulée en 1979 à Vaulx-en-Velin (déjà dans la banlieue lyonnaise). Puis, le phénomène s’est étendu à l’ensemble du territoire national.
Durant les années 90, dans certains secteurs, comme les départements de la grande couronne parisienne, il ne se passait pas de soirée en fin de semaine sans dégradation de mobiliers urbains, incendies de voitures, de gymnases ou d’écoles, jets de projectiles sur les véhicules de police ou sur des bus transportant des voyageurs. Si les évènements se résumaient à quelques voitures brulées, on considérait que la nuit avait été calme. Pour éviter toute surenchère entre les cités, on évitait de communiquer sur ces évènements.
En 2005, on atteignit le paroxysme, avec 28 000 voitures brulées sur l’ensemble du territoire national et l’instauration de l’État d’urgence.
Par la suite, nous avons connu une relative accalmie. Et de nouveau, ces dernières années et plus particulièrement ces derniers mois, les violences urbaines se multiplient.
L’existence de points de vente peut certes expliquer des violences entre groupes en concurrence et leur démantèlement peut générer des réactions de la part d’individus voyant ainsi s’envoler des possibilités d’accéder à des revenus faciles (tentatives d’intimidation d’élus, dégradations, prises à partie de patrouilles de police). Mais, ce constat est loin de pouvoir tout expliquer à lui seul.
D’ailleurs les affrontements qui se sont produits dans le quartier de la Duchère, faisaient suite à un accident survenu le 3 mars, au cours duquel un jeune de 13 ans conduisant sans casque a été grièvement blessé. Selon la rumeur, un véhicule de police banalisé aurait été impliqué.
L’explication ministérielle permet surtout d’éviter de poser d’autres questions.
Pourquoi actuellement, tant de jeunes sont prêts à commettre des actes de violences ?
Des années de laxisme, la démission de certains parents, des dysfonctionnements dans l’enseignement, la réduction des effectifs de police et de gendarmerie, des fermetures de commissariats de secteur et de brigades de gendarmerie, l’insuffisance des moyens de la direction de la Protection judiciaire de la jeunesse, la perception des contraintes imposées durant la crise sanitaire ; autant d’éléments d’explication qui devraient être pris en compte pour apporter des solutions, en commençant par la réponse pénale.
Au sein des groupes impliqués dans ces évènements, on retrouve souvent quelques meneurs (des individus à forte personnalité) et des suiveurs (influencés par les premiers). L’absence de sanction effective rapide prononcée à l’égard des premiers (lorsqu’ils sont interpellés) ne peut qu’engendrer un sentiment d’impunité et renforcer leur influence sur les seconds.
Mais peu importe que des mineurs de plus en plus jeunes participent maintenant à ces violences (à Dijon des incendiaires de 10 et 11 ans ont été interpellés). Pourquoi envisager d’améliorer les process judiciaires de prise en charge de ces jeunes délinquants ? Puisque, comme l’a affirmé notre garde des sceaux : « La délinquance des mineurs n’a pas augmenté en 10 ans. L’insécurité n’est qu’un sentiment de l’ordre du phantasme. Si la justice est taxée de laxisme, c’est uniquement parce que les Français ne savent pas comment ça fonctionne »
Dormez bien braves gens !
Le ministre de l’intérieur nous l’assure « à la fin ce sera toujours la police qui va gagner »
Bruno Grangé
Délégué National à la Sécurité