Chaque semaine apporte son lot de décrépitude pour la France, et ce, dans la résignation et la placidité de tous.
Alors que Mistral AI était menacée de rachat, potentiellement par Apple, il y a quelques jours, et qu’il est évoqué une levée de fonds qui se ferait avec les Émirats, arrêtons-nous sur deux malheureuses nouvelles récentes :
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l’abandon de la solution française EasyVista pour l’américain ServiceNow par la région Île-de-France. Pour un logiciel d’ITSM (gestion des services informatiques sur le matériel et le logiciel), soyons sérieux, on ne peut trouver d’arguments imparables : la région avait tous les moyens de rester un client et un partenaire pour faire avancer et promouvoir cette solution française.
Chaque décision de ce type est un coup de boutoir au soutien du logiciel français.
Acteur majeur mondial, EasyVista a acquis l’allemand OTRS en 2024 et a même été choisie par l’OTAN.
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le rachat du lyonnais Ciril Group par les Américains, acteur cloud fournisseur de 2 500 collectivités locales françaises.
Même si la quasi-totalité de ce type d’acteurs ne peut assurer une souveraineté numérique nationale, car utilisant nécessairement, partout, des solutions américaines, symboliquement, c’est un énième exemple des effets des marchés capitalistiques mondiaux, débridés, sans possibilité d’intervention gouvernementale.
Tant que les directeurs des systèmes d’information vivront dans un écosystème atlantiste, antipatriotique, dans un club fermé qui vise à l’uniformisation, la non-prise de risque, l’admiration de ses pairs en adoptant les services des clouds américains, eh bien, nos sociétés numériques de toutes tailles seront fragilisées (extraterritorialité du Cloud Act) voire perdues.
La France n’aura que ses yeux pour pleurer une fois devenue une colonie numérique américaine.
La Commission pourrait insuffler un “communautarisme numérique”, une préférence sur les acteurs publics et privés. Bien au contraire, sont nés deux phénomènes :
- La passivité quant à faire émerger des géants du numérique sur notre continent.
- Le seul intérêt pour le contrôle et la punition par des réglementations (DSA, DMA, RGPD, IA Act) afin d’infliger des amendes et de forcer à notre surveillance.
Si nous ne pouvons faire confiance à la grande majorité des politiques qui ont adopté un comportement d’influenceurs à coup de communication et de conférences médiatisées (Sommet pour l’action sur l’IA, Choose Europe for Science, Viva Tech, etc.), c’est aux opérationnels de se battre et d’adopter une stature de patriotisme économique et numérique.
À chaque étage du monde numérique : matériel de stockage, réseau, firmware, software, tout est verrouillé par un acteur américain.
Il est urgent d’avoir un réel “Small Business Act” français car l’UE est incapable d’édicter cela par simple dogme atlantiste.
Les acteurs de ce périmètre de réglementation (administrations, entreprises nationales) devront alors argumenter pour obtenir des dérogations pour ne pas prendre une solution française et, enfin, la supercherie se verra : celle de laisser mourir nos acteurs locaux ou de les gonfler artificiellement avant leurs rachats par des puissances étrangères. Entendons par là, des rachats aussi bien extra qu’intra européens bien entendu…
Il suffit de voir les obligations annexes de l’accord commercial tramé en Écosse récemment.
Ursula von der Leyen assumait, ce 27 juillet, à propos de giga-factories d’IA de l’UE, qu’elles “aideront les États-Unis à maintenir leur avance technologique” (1).
Lionel Mazurié
Vice-Président de Debout La France
(1) https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/statement_25_1915 (en milieu de déclaration)