Les mots de l’Europe – Travailleurs détachés

Travailleurs migrants exerçant leur métier dans un pays tiers de l'UE, aux conditions salariales et légales du pays-hôte mais en payant les cotisations sociales du pays d'origine.

Après la crainte légitime suscitée en 2005 par le spectre du « plombier polonais », qui a abouti à une refonte hélas seulement partielle du projet de directive Bolkestein, les Français ont découvert avec effroi le phénomène des « travailleurs détachés », cause d'un dumping économique et social dévastateur à l'intérieur des pays membres et entre eux. Concrétisation déséquilibrée de la liberté de circulation et d'établissement en Europe, inscrite dans les traités, la directive de détachement des travailleurs a été adoptée en 1996. D'abord indolore, elle est montée en puissance au cours des années 2000 et ses effets pervers, notamment à cause de l'adhésion des anciens pays de l'Est, se sont multipliés et amplifiés : impossibilité de contrôler les flux – il y aurait « au minimum » 350 000 travailleurs détachés en France selon le gouvernement, dont la moitié à peine serait déclarée -, développement du travail clandestin ou semi-clandestin, création d'entreprises fictives dans les pays d'origines pour « importer » une main d'oeuvre ponctuelle low-cost dans les pays de destination, etc.
 
Le dumping social qui en résulte déstabilise les conditions de la concurrence : d'une part, à l'intérieur des pays d'Europe occidentale (notamment dans les secteurs du BTP et des transports), où de grands groupes peu scrupuleux ruinent les PME honnêtes et raflent l'essentiel de la commande publique. D'autre part, entre les pays européens eux-mêmes, dont certains systématisent cette pratique de la concurrence faussée – dans l'agroalimentaire en Allemagne par exemple – pour réaliser des gains de compétitivité abusifs face à leurs voisins. Au final, ce sont des dizaines de milliers d'emplois en France, comme dans d'autres pays comparables, qui sont détruits, sans que les travailleurs « bénéficiaires » de ce système en profitent réellement (ils sont souvent exploités), ni que ce phénomène soit compensé par le détachement de travailleurs français en Europe – ces emplois, souvent qualifiés, existaient déjà avant 1996 sous le statut de l'expatriation professionnelle. Complètement débordés par l'ampleur des dérives de la directive (« une véritable inondation », selon les acteurs du dossier), les gouvernements ont réformé en catastrophe ce système en décembre 2013, en décidant notamment des sanctions plus lourdes contre les entreprises indélicates. Mais cela ne résoudra nullement l'impossibilité pratique pour les autorités des pays d'accueil de contrôler efficacement les flux plus ou moins clandestins et n'affectera pas davantage la règle des cotisations dans le pays d'origine, qui organise un véritable dumping légal.
 
 
Il n'est pas possible de résorber les désordres de la directive détachement, c'est la directive elle-même qu'il faut abroger. Les candidats des listes « Debout la France, ni système, ni extrêmes ! » s'engagent à porter ce combat qui s'inscrira dans celui, plus vaste, d'une profonde réforme du marché intérieur européen pour permettre par des dispositifs de compensation de résorber toutes les formes de dumping (fiscal, social, etc.) qu'une libre circulation insensée et irréaliste a laissé se développer.