En annonçant une énième réforme du lycée professionnel, le Jeudi 4 Mai 2023 en Charente-Maritime, Emmanuel Macron vient de tuer, pour partie, l’enseignement professionnel et de mettre au chômage des milliers de professeurs. Voyons dans le détail les mesures annoncées par le chef de l’Etat et leurs implications concrètes sur le terrain.
- « À partir de la rentrée de septembre, les élèves des lycées professionnels qui partiront en stage seront rémunérés. Le montant de la rémunération variera selon le niveau d’étude du lycéen : 50 euros par semaine en classe de seconde et en première année de CAP, 75 euros en classe de première ainsi qu’en deuxième année de CAP et 100 euros en terminale Bac Pro ou CAP » – Mesure en trompe l’œil ? Nous sommes en droit de nous poser la question… Rémunérer des lycéens qui proviennent de classes sociales défavorisées semble être une bonne idée en soi. Cependant, rien n’est dit sur les indemnités qui compensaient précédemment les transports des élèves vers leur lieu de stage. Qu’adviendra-t-il si un élève doit chercher un stage à 50 kms de chez lui dans un domaine spécifique (industrie de la chaudronnerie, métiers de la mode) ? Il perdra le bénéfice des moyens qui lui étaient alloués alors que ses camarades de classe qui auront un stage proche de chez eux, auront un bénéfice net important. Au final, on voit que cette mesure creusera le fossé entre les plus aisés et les plus en difficultés, alors que ce n’est pas la philosophie du lycée professionnel.
- « La durée des stages augmentera de 50 % en terminale pour les élèves qui souhaitent « entrer dans la vie active après le bac ». « Ils seront accompagnés par Pôle emploi (France Travail demain) », a précisé Emmanuel Macron. Les élèves qui, en revanche, veulent poursuivre des études après le bac, auront quatre semaines de cours supplémentaires pour préparer leur entrée en BTS. » C’est à croire que même le ministre de l’Education Pape N’Diaye, n’a jamais visité un lycée professionnel, encore moins eu connaissance de la manière dont s’organisent les cours dans une structure de la sorte, notamment pendant les PFMP réalisées par les élèves. Les professeurs ont pour la plupart, la légère impression que le Président tente d’acclimater les enseignants à une sorte de mixité pour intégrer dans quelques temps, à la fois des élèves en initial avec des élèves en apprentissage, ce qui serait encore plus problématique à la bonne exécution des programmes. Comment organiser la pédagogie lorsque la classe comporte la moitié des élèves ? Comment assurer correctement le suivi des élèves en stage, en n’ayant donc plus de créneau disponible pour pouvoir le faire ?
- « Quand on a une filière (…) où il y a très peu de débouchés en emploi, très peu de débouchés en enseignement supérieur, cela veut dire que c’est sans doute une filière qu’il faut fermer ». Emmanuel Macron annonce la fermeture de 80 filières, notamment dans le domaine tertiaire (Gestion et Administration, Commerce et Vente, Accueil…) pour en créer 150 notamment dans le domaine industriel (chaudronnerie, génie thermique, nucléaire…), invoquant 10 métiers en tension correspondant à 10 filières dans ce domaine. Que vont devenir les professeurs laissés sur la touche par cette réforme ? Le ministre de l’Education demande que ces enseignants deviennent professeur de collège ou professeur des écoles ! Des métiers fort honorables et importants mais qui ne correspondent pas du tout aux compétences des PLP, qui ont passé un concours permettant de développer des compétences en rapport avec de jeunes adultes, pas avec des maternelles ou des primaires.
- « Le pacte enseignant. On doit reconnaître leur engagement, face à un public souvent en difficulté. Chaque professeur pourra prétendre à une augmentation allant jusqu’à 7 500 € annuels, soit 680-780 € par mois ». Il est évident qu’il n’existera pas de missions pour l’ensemble des professeurs qui veulent gagner plus, ce qui risque de renforcer le clivage entre les différents personnels des lycées professionnels. En effet, il y aura beaucoup moins de missions dans un petit lycée de campagne qu’un grand lycée d’une grande métropole française qui accueille beaucoup d’élèves.
Rudy TRICOTEAUX
Délégué de Circonscription
1ère Circonscription de l’Aisne