Du Pape François

La laïcité, c’est l’indépendance du pouvoir politique et administratif de l’Etat vis-à-vis des religions, leurs organisations, leurs conceptions morales ou sociales. Mais ce n’est pas le déni ou l’hostilité, encore moins la répression, car la liberté de conscience est un principe sacré de la République. Cette neutralité permet de gérer la paix civile.

D’ailleurs la laïcité a été inventée par le Christ («mon royaume n’est pas de ce monde », «rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu»), qui a inventé aussi l’universalité (contre l’idéologie d’un « peuple élu », y compris en faveur des « gentils »), l’égalité (y compris homme/femme), la fraternité (y compris pour les basses castes, les femmes de vie douteuse), la liberté( y compris religieuse). On comprend mieux pourquoi on cherchait à le tuer. On tue encore aujourd’hui pour cela.

Il n’en reste pas moins que l’élection d’un nouvel évêque de Rome est un fait politique majeur, car le Pape :

  • est, quelle que soit la croyance de chacun, une des 3 autorités morales planétaires (avec le Secrétaire général des Nations Unies et le Dalaï Lama),
  • une voix écoutée par 2 milliards de chrétiens (dont 1 milliard deux cent mille catholiques), soit le tiers de l’humanité

C’est donc, inévitablement, un phénomène politique important que l’élection d’un grand leader spirituel : la France, pays de tradition chrétienne, ne saurait ne pas y être attentive.

Or ce Pape, de surcroît, attire particulièrement l’attention. Evidemment, chaque fois qu’un Pape est élu, les professionnels de l’antichristianisme primaire, s’agitent dans les égouts pour essayer d’y trouver la preuve de quelque discrédit ou suspicion. D’autres, immanquablement (qui ne sont d’ailleurs pas chrétiens), s’étonneront que le Pape soit catholique et qu’il défende les valeurs de sa foi et de sa tradition… Reste la vraie question politique : le pape peut-il apporter sa valeur ajoutée  à l’humanité ? A la France ?

Sept caractéristiques majeures se distinguent lorsqu’on se penche sur le parcours et le discours du Pape François :

  • ce qui saute, d’abord, aux yeux c’est qu’il est, dans l’histoire, le premier pape américain, c’est à dire issu d’un continent qui compte la moitié des chrétiens de la planète,
  • et ce continent est très intéressant car il a été malmené par : la colonisation, les coups d’état et la dictature, la misère et d’immenses inégalités. Il est bien plus à l’image du monde réel que ne l’est désormais, l’Europe, qui vient de panser ses plaies nazies et communistes, et faire la paix avec elle-même, sous le magistère de papes polonais et allemands.
  • en Amérique du Sud, l’Eglise, et singulièrement les Jésuites dont François est issu, ont eu un rôle militant et quasi révolutionnaire en s’interposant pour défendre les autochtones (cf. le film historique Mission et le Dominicain Bartolomé de las Casas), les pauvres et les exploités (théologie de la libération de Helder Camara).
  • François a pris des positions hostiles à la mondialisation, au FMI…
  • il a (avec un humour certain) dit (lors de sa première apparition publique en tant que pape au balcon du Vatican), qu’il aurait à « évangéliser Rome »…(allusion aux apparatchiks de la Curie)
  • demandé à la foule massée sur l’esplanade vaticane de prier pour lui attirer la bénédiction divine, ce qui est une façon d’affirmer sa volonté de « bottom-upiser » l’Eglise,
  • placé son magistère sous les auspices de François d’Assise qui, outre le fait qu’il tenait peut être son surnom d’origines plus ou moins françaises, s’est signalé par son mysticisme, son choix d’une pauvreté extrême, et son dialogue célèbre avec les musulmans.

En résumé, le Pape François est doté d’une extraordinaire personnalité, hors du commun. Il pourrait bien nous surprendre et peser sur l’ordre du monde, bien plus encore que ne le fit –ce qui ne fut pas rien- Jean Paul II

Henri Temple
Membre du Bureau national de DLR
Délégué national à l'Indépendance de la France