Après le rejet d’ACTA, mettons au placard Hadopi

Le rejet du traité ACTA par le Parlement Européen est un grand succès pour la démocratie. Alors que la crise sert d’excuse systématique au contournement, voire à la négation, de la volonté des peuples dans la maitrise de leur propre destin, ce vote nous montre qu’une mobilisation citoyenne ambitieuse peut remporter d’impressionnantes victoires.

Il faut d’ailleurs saluer le travail et la mobilisation engagés depuis trois ans par les associations de citoyens et les ONG. Elles ont su mobiliser l’opinion publique par delà les clivages partisans contre un traité qui avait été négocié en secret et qui entendait bien être voté à l’abri du regard critique des peuples.

Notre mouvement s’est constamment opposé à ce traité. Celui-ci représentait une menace tant pour les libertés individuelles que pour le progrès social, culturel et humain que porte la révolution numérique. Justifié et légitime dans son principe, le droit de propriété intellectuelle y est dévoyé vers une privatisation de la connaissance, une confiscation de la culture et une limitation systématique des libertés individuelles.

Incapables d’accepter et de proposer de nouveaux modèles susceptibles d’allier les nécessités économiques avec les avancées considérables permises par la révolution numérique dans l’accès et le partage du savoir, les lobbys diabolisent les internautes. Les multinationales trouvent dans le pouvoir politique un idiot utile prompt au conservatisme. Pire, ce traité institutionnalisait une extension des abus de ce droit de propriété en condamnant la production par les pays pauvres de médicaments indispensables aux soins de leur population à des prix abordables. Plus que réactionnaire, ACTA était donc criminel.

Devant ce premier succès, il faut pourtant rester vigilant. En effet le rejet du Parlement Européen n’a malheureusement pas enterré le traité définitivement. Les règles de la technocratie européenne laissent toujours à son pouvoir les moyens de contourner les décisions du Parlement, la seule instance démocratique de Bruxelles. La Commission a d’ores et déjà demandé à la Cour de Justice de l’Union européenne son avis sur la conformité du traité, et Karel de Gucht, commissaire au Commerce, a annoncé, après quelques « éclaircissements » un deuxième vote. Il importe de rester sur nos gardes car la technocratie européenne nous réserve souvent de mauvaises surprises.

Notre vigilance doit aussi se porter envers les nouveaux combats à mener sur les libertés numériques. Le rejet d’ACTA est un sujet primordial qui annonce d’autres lois à venir, notamment en France. Neutralité du net, droit à l’anonymat… et bien sûr abrogation de la loi Hadopi. Le vote des députés européens français et les réactions que le rejet d’ACTA a suscitées dans notre pays sont d’ailleurs riches d’enseignements !

La moitié des votes en faveur d’ACTA ont été le fait de député français, ci-devant UMP ou Radicaux Valoisiens. Belle image pour la patrie de l’exception culturelle que cette confirmation par les inventeurs d’Hadopi de leur aveuglement forcené ! Nul doute que l’UMP, les centristes et les amis de Jean-Louis Borloo n’auront rien d’autre à proposer au cours de la prochaine mandature que la poursuite de la défense systématique des lobbies et de la chasse aux internautes.

La réaction du Parti Socialiste est plus subtile mais non moins inquiétante. Si le vote des élus socialistes contre ACTA va dans le bon sens, on ne peut que remarquer le silence assourdissant du gouvernement. Fleur Pellerin, ministre déléguée à l’économie numérique n’a réagi que 20 heures après la décision, sur un ton sibyllin que chacun sera libre d’interpréter à sa propre discrétion. Quant à Mme Filippeti, ministre de la Culture ? Rien ! Pendant la campagne, le Parti Socialiste s’est bel et bien opposé à ACTA et à l’Hadopi mais sans avoir aucune solution concrète à donner.

La position de Debout la République a toujours été claire. DLR reste plus déterminé que jamais. Nous défendrons farouchement la neutralité du net et du droit à l’anonymat des internautes afin de garantir la liberté des échanges. Nous militons pour l’abrogation immédiate d’Hadopi et son remplacement par une licence globale prélevée sur les fournisseurs d’accès à internet pour rémunérer comme il se doit les artistes. Surtout, nous promouvrons systématiquement les politiques qui permettent à la révolution numérique de réaliser ses promesses d’ouverture, de diffusion, d’expression des connaissances, du savoir, de l’information et des opinions.